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Chanteur charismatique et multi-instrumentiste aguerri, Aziz Sahmaoui ne nous est pas inconnu puisqu’il fut le cofondateur du très populaire Orchestre National de Barbès (ONB) au début des 90’s, une période où ce Marocain venu de Marrakech à Paris s’est également illustré aux côtés de Joe Zawinul, Karim Ziad, Khaled, Nguyen Lê ou encore Sixun. Il y a dix ans, celui qui a imposé l’ambiance des hauteurs de l’Atlas dans le XVIIIe arrondissement de la capitale a créé son University of Gnawa, groupe réunissant des musiciens sénégalais, maghrébins et français, tous comme lui initiés aussi bien aux mélodies traditionnelles du chaâbi et aux tourneries africaines qu’au jazz et au rock occidental le plus psychédélique. Pour fêter cette décennie parsemée de trois albums, Aziz a souhaité faire paraître ce best-of (déjà dans les bacs) qui permet de réviser cette discographie qui les a menés avec succès sur toutes les grandes scènes mondiales. Aux morceaux existants ici réenregistrés avec une multitude d’invités –soit au total quinze musiciens-, s’ajoute deux titres inédits, dont le single d’ouverture Un Homme Bon , et Afrikya en clôture joué à quatre mains.

 

Mystique et étourdissant

On comprend à la vue de leurs cultures d’origine comme de leurs parcours et de leurs goûts, que les membres d’University of Gnawa emmènent le patrimoine traditionnel vers une modernité toute contemporaine, mariant une foultitude d’instruments typiques et ancestraux à l’électricité des guitares, basse et autres claviers. Le résultat donne le meilleur de la « fusion » dans l’esprit du Syndicate de Zawinul, où se mêlent mélopées extatiques du Sahara, tourbillons rythmiques afro et transes telluriques du jazz-rock, avec un son particulièrement puissant. Parfois très speed et intense comme sur Ana Hayou, un classique survitaminé porté notamment par la guitare hendrixienne du grand Hervé Samb (Pat Metheny, Lisa Simone, Amadou & Mariam entre tant d’autres…), une figure réputée de la musique africaine qui illumine tout le disque. Cette superbe guitare (escortée par celle d’Amen Vianna) est plus groovy sur Janna Ifrikia, ou se teinte de réminiscences  « Gonguiennes » sur le plus rock Lawah-Lawah. La basse appuie du lourd sous les doigts effrénés  d’Alioune Wad en binôme de choc avec la batterie et les folles percussions où l’on retrouve Cyril Atef (ONB, Bumcello…), Jon Grancamp et Adhil Mirghani. Côté instruments trad’, on y détourne allégrement le ngoni mandingue, on fait étinceler la kora, le bendir, le karkabou ou la derbouka, toute la palette des cordes exotiques étant embarquée dans ce frénétique voyage sonore où nombre de refrains nous accrochent par leur emprise envoûtante (avec aussi l’apport du violon de Michaël Nick et la flûte magique de Naissam Jalal sur le mélancolique Firdawss). Voilà un album pour le moins solaire, radieusement étourdissant, parfois mystique et souvent dansant, comme notamment cet Afrikya en clôture qui nous rappelle quelque part l’entêtant Leila Leila des Négresses Vertes.